mercredi 8 juillet 2009

Pink Floyd - Atom Heart Mother

Sorti vers la fin de l'année 70, Atom Heart Mother rompt complétement avec le Floyd Barrettien (celui qu'on a pu écouter sur des The Piper At The Gates Of Down ou A Saucerful Of Secrets) et inscrit véritablement le groupe dans sa période la plus connue et la plus prolifique (sous la houlette de Roger Waters) mais aussi ma préféré. Atom Heart Mother suit donc d'une année l'expérimental Ummagumma (double compact, l'un comprenant un titre par musicien où celui-ci crée comme bon lui semble ce qu'il veut [je reconnais que l'ensemble est un peu lourd parfois], et l'autre étant un live du Floyd sans Barrett reprennant des chansons des deux premiers albums [excellent live]) et en obtient une place difficile dans la carrière du Floyd. En réalité, tout était mis en place pour que cet album soit un désastre -du moins c'est comme ça que je le vois- le cadre spatio-temporel est difficile tant dans les différents courants (début de la fin du mouvement hippie, naissance du Hard Rock) que de la place du disque dans la discographie du groupe (déception du grand public vis-à-vis du précédent opus), les chroniques qui qualifient l'album comme une vaste fumisterie, la pochette et le nom (certes c'est le choix du groupe mais ça ne les aide pas) et surtout son contenu.
A l'inverse du White Album des Beatles (qui sortira un mois plus tard et avec qui ils ont un lien très particulier), Atom Heart Mother comprend une photo mais ni titre ni nom de groupe (le White Album étant tout blanc avec juste inscrit The Beatles sur le devant). En fait, rien que pour avoir eu ce culot, cet album est magique (bien sûr il existe moult albums totalement vierges mais tellement incomparables avec celui-ci). Et cerise sur le gâteau, la pochette choisie représente une vache! En réalité le Floyd commanda à un photographe anglais (Storm Thorgerson) "quelque chose de simple". Celui-ci s'exécuta, partit à la campagne et rapporta quelques clichés d'une vache nommée Lulubelle 3 dans sa prairie.
Autant vous l'annoncer d'entrée de jeu, cet album est avec Meddle et Dark Side Of The Moon -et dans un second temps Wish You Were Here- mon préféré du Floyd (toutes périodes confondues).
Fini le temps des petits bidouillages sonores, fini le temps des paroles sur un monde imaginaire, fini le Floyd approximatif qui ne trouve pas vraiment sa voix et qui oscille entre expérimental et psychédélisme. Le groupe annonce et date sa rupture avec tout mouvement pour se retrouver hors du temps et de l'espace. Si les premiers albums avaient des airs de concept celui-ci l'assume à 200% et ne s'inscrit plus comme une musique populaire mais une oeuvre. N'ayons pas peur des mots, Atom Heart Mother est le premier chapitre d'une longue lignée d'oeuvres.
"Mais qu'est-ce qu'il y a dans cet album pour qu' il s'enflamme si rapidement et hardemment?" me direz-vous. Il y a une Suite qui dépasse l'avant-gardiste et touche le chef-d'oeuvre. Dévellopé en presque 24 minutes, ce mélange des instruments du Floyd (claviers, guitare, basse, batterie) et d'orchestration (que l'on doit à Ron Geesin pour la majeure partie de la composition) comme des cordes et des choeurs (féminins et masculins) donne un côté de Suite rock grandiose et qui transpire la virtuosité. On notera également la présence de cuivres (notamment pour le thème principal autour duquel s'articule le morceau) tout au long de la piste (recouvrant presque une face entière du vinyl) et un "long" passage expérimental sonore. Ces 24 minutes sont d'une intensité inouïe (un peu à la manière d'Echoes un an plus tard) et d'une beauté..
La seconde face du vinyl (la "seconde partie" du disque) compte 4 chansons dont 3 ballades (chacune écrite et interprétée par un des paroliers du groupe, à savoir Waters, Wright et Gilmour). La première: If, est celle de Roger Waters, une ballade qui sonne très Leonard Cohen (Suzanne). La seconde, Summer '68, celle de Rick Wright (claviers et jouant du trombonne ici) est une semi-ballade avec un refrain plutôt magistral et une orchestration de folie, traitant d'une histoire d'un soir avec une fille quelconque. Et la petite dernière: Fat Old Sun, celle du petit "nouveau", David Gilmour, qui signe ici une ballade harmonieuse et reposante avec un solo savoureux. Le dernier titre de l'oeuvre traduisible par le petit déjeuner psychédélique d'Alan présente une reproduction des bruitages familiers d'un petit déjeuner anglais classique (remplissage d'une casserole, céréales dans un bol, oeufs brouillés, etc.) entrecoupée de passages instrumentaux agréables et légers.
Tirant son nom du gros titre d'un journal (le Evening Standard du 16 juillet 70 précisément) que le groupe avait trouvé amusant (article racontant qu'une mère avait acquis un stimulateur cardiaque atomique), et en dépit de sa pochette assez provocatrice malgré elle, l'album fût perçu comme une mauvaise blague par la presse, à l'époque -et peut être même encore aujourd'hui- la fusion entre rock et orchestre paraissait inimaginable tant les deux sonorités étaient différentes, mais on cria également au canulard en entendant Alan prendre son petit déjeuner entre deux instrumentaux. Mauvaise blague condamnée également par la présence d'une petite originalité sur le protège-vinyl (pour l'édition disque, un feuillet plastifié est glissé avec le livret) présentant deux recettes de cuisine amusantes (ou de mauvais goût) dont je vous laisse la surprise. Le livret de la version disque est également fourni en belles photos comme chaque livret du Floyd.
Enregistré aux studios d'Abbey Road, l'histoire veut que les Beatles enregistrèrent la majeur partie de leurs oeuvres dans le studio voisin (d'où quelques clins d'oeils amusants) et c'est le célèbre ingénieur son Alan Parsons (du Alan Parsons Group en effet) qui s'occupe de cet album comme d'Abbey Road des Beatles ou quelques années plus tard du brillant Dark Side Of The Moon.
Atom Heart Mother, dans sa globalité, reste un coup de maître largement maitrisé, une oeuvre avant-gardiste surprenante (encore aujourd'hui) qui ne connût ni suite ni réplique. Et si cet album représente ce qui se fait de mieux dans le genre, je lui reconnais volontiers UN point faible (tout comme pour Meddle), celui de la dernière piste ici (et de l'hymne chantée à la fin de Fearless sur Meddle), qui je trouve, ne correspond pas vraiment avec ce que l'album offre (une ambiance "sérieuse", une musique de choix et d'une qualité mes amis!..). C'est pour cela que la note maximale ne peut lui être décernée, mais il se retrouve au coude à coude avec l'étonnant Meddle et Dark Side Of The Moon le magnifique pour la palme du meilleur album.
Verdict: 9,5/10
  1. Atom Heart Mother Suite (23.44)
  2. If (4.30)
  3. Summer '68 (5.29)
  4. Fat Old Sun (5.22)
  5. Alan's Psychedelic Breakfast (13.00)
    Durée Totale: 53 minutesLine-up:
    Roger Waters (Basse et chant)
    David Gilmour (Guitare et chant)
    Rick Wright (Claviers et chant)
    Nick Mason (Batterie)
    Genre: Rock Psychédélique/Progressif
    Label: EMI
    Date de sortie: 5 Octobre 1970
    Prix: plus de 20€
    Lien pour acheter l'album sur Amazon.fr
    Lien pour écouter Fal Old Sun sur Youtube.fr

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Veuillez écrire votre commentaire.